Si vous vous intéressez à l’éducation canine, vous avez sans doute déjà entendu dire que tous les chiens sont différents, qu’il faut s’adapter à chacun ou encore que l’on éduque pas un primitif comme un berger... Et puis un chien-loup tchécoslovaque, un husky, un […], c’est tout de même un chien "à part".
J’aimerais vous proposer un concept tout simple : tous les chiens sont les mêmes. Si l’on ramène l’apprentissage à sa base : "comment le chien apprend", ils sont tous pareils. Ce qui différencie les chiens les uns des autres ce sont des détails tels que la rapidité de compréhension, la tendance à l’auto-défense, la sensibilité, la concentration, la motivation,... Autant de points très importants en éducation canine ! Mais des points secondaires au final. Qu’est-ce qui fait qu’un chien obéit ? Parce qu’il apprend que c’est le mieux pour lui. Au départ, ça lui permet d’éviter des choses désagréables ou d’avoir des choses agréables. A la fin, il obéit par "habitude". Et ça, c’est le cas d’absolument tous les chiens qui sont dans un âge où ils peuvent apprendre...
Il y a des chiens qui encaissent mieux certaines méthodes que d’autres. Par exemple, si je dis "non !" d’un ton sévère à un chien sensible, ça peut suffire à l’inquiéter et à le mettre dans un état où l’apprentissage ne sera pas optimal du tout. Alors que dire "non !" a d’autres chiens n’aura pas l’air de poser le moindre problème. Alors on peut être tenté de se dire qu’ils sont totalement différents et qu’il faut donc choisir des méthodes foncièrement différentes. C’est tentant mais je pense que c’est une erreur. Pourtant, il y a des tas de choses à adapter. Qu’est-ce qui motive cet individu chien ? Ce ne sera pas unique, mais presque. Qu’est-ce qu’il aime ? Durant combien de temps reste-t-il concentré ? Tout ça, c’est important.
La sensibilité, on s’en rend compte si le chien montre clairement des signes de nervosité : s’il se fait pipi dessus par exemple, n’importe qui ou presque sera capable de dire que la méthode est trop violente pour lui. S’il recule simplement, pour s’éloigner de ce qui l’inquiète, dans certains cas, on pensera que c’est un effet positif de la méthode. On peut effectivement croire que si on engueule un chien et qu’il recule, c’est qu’il a compris. S’éloigner d’un danger ne devrait pas être perçu comme quelque chose de souhaitable. Seulement, si certains reculent, d’autres se défendent. Pour tout cela, on a des indices de mal-être. Les derniers... et bien ils encaissent.
C’est alors que l’on parle de l’efficacité et de la rapidité d’apprentissage. Ça a l’air efficace et c’est rapide, mais est-ce que cela suffit à définir une bonne méthode ? Une méthode qui fonctionne par les circuits de la fuite entraîne forcément des dérives ne serait-ce que le plus élémentaire des soucis : aimer l’apprentissage. Pourquoi le chien aimerait-il apprendre s’il apprend par la fuite ? S’il n’aime pas apprendre et fuit les situations d’apprentissage, comment penser que la méthode est optimale ? Une bonne méthode devrait permettre d’améliorer les compétences d’apprentissage. Par exemple, si j’emploi une méthode de leurre, j’apprends indirectement à mon chien que le leurre est une méthode possible et si je recommence pour un autre apprentissage, il sera plus rapide à comprendre. C’est exactement la même chose avec les méthodes employant la crainte, l’inquiétude, la fuite,... Ce sont des choses qui peuvent se reproduire. Le chien reste à l’affût. Il ne faut pas croire qu’une méthode dure à lieu une fois et puis, c’est fini. Le fait même qu’elle puisse arriver a une importance, qui s’amenuisera peu à peu si elle ne se renouvelle pas.
Du coup, il y a un choix à faire qui est totalement indépendant de la race choisie : est-ce que l’on veut se servir de circuits d’apprentissage d’évitement, qui sont liés à la fuite ou / et à l’auto-défense ou / et à l’inhibition avec les conséquences que cela comporte ? C’est un pack. On ne peut pas choisir une méthode provoquant la fuite, sans risquer l’inhibition et l’auto-défense. On ne peut pas non plus ne pas craindre une généralisation des causes de la fuite.
Un exemple pouvant permettre de voir que cela existe chez le cheval. Pour faire reculer un cheval, on peut appliquer une main sur son poitrail. On augmente la pression jusqu’à ce qu’il décide de reculer. Puis, on recommence. La pression nécessaire sera de moins en moins forte. Finalement, si l’on touche les hanches du cheval, il les décalera pour fuir le contact, la pression, car il a appris à le faire. Il l’a généralisé. Maintenant, imaginez que votre cheval a une douleur et qu’il faille le masser. Mettre une pression, même légère et supprimer le réflexe de fuite que vous lui avez appris ne sera pas évident, n’est-ce pas ? La généralisation peut être quelque chose de très intéressant ou de difficile à gérer. Gardez simplement à l’esprit qu’un apprentissage n’est pas un élément isolé, dans une petite bulle, qui n’aura aucune répercussion. Un apprentissage se fera sur la manière d’apprendre, sur la relation, sur tout un tas de chose.
On en vient du coup, au dernier des points, est-ce que le jeu en vaut la chandelle et est-ce que le but est possible ? Je ne crois pas que tous les apprentissages soient possibles de façon correcte. Certaines choses vont tellement à l’encontre des peurs, des besoins, de ce qu’est l’animal, qu’il vaudrait peut-être mieux abandonner l’idée, tout simplement. Mais je ne prône pas une non-éducation, je ne pense pas qu’il faille abandonner toute idée de punition ou encore accepter d’avoir un chien non éduqué. Seulement, je crois sincèrement que les plus sensibles des chiens devraient être pris pour "modèles de base" et que l’on ne devrait pas se permettre d’employer des méthodes simplement parce que tel chien les supporte.
Alors il reste quoi au bout du compte ? Comment éduque -t-on les plus sensibles ? En leur donnant envie de faire, en les respectant et en étant malin. S’il y a un mur face à vous, vous pouvez foncer dedans ou être malin, prendre du recul, vérifier jusqu’où il s’étend, si on ne peut pas trouver un autre chemin pour le dépasser ou préparer les outils nécessaire pour le faire disparaître... Un exemple ? Un chien voleur s’auto-récompense et renforce son comportement par ses vols. Vous pouvez foncer dans le mur et chercher à le punir. Vous pouvez contourner le mur en renforçant un autre comportement : s’occuper d’un jouet d’occupation plutôt que de la poubelle. Ou vous pouvez faire disparaître le sac poubelle, derrière une poubelle qui se ferme correctement par exemple.
Le choix qui est à faire est peut-être facile ou peut-être pas, mais il sera lourd de conséquence. Ne pas employer certains "circuits" demande une bonne connaissance de l’éducation canine. C’est là que se faire aider par un éducateur canin peut-être utile.
J’aimerai partager avec vous cette carte pleine d’éducateur canin :