Après un premier article sur
les risques sanitaires, j’aimerais revenir sur le fait d’adopter dans un salon du chiot. En salon, le meilleur cas de figure est de rencontrer un élevage (qui peut emmener ses adultes par exemple) et d’utiliser ce temps pour discuter et prendre les coordonnées. Ce qui permet ensuite de réfléchir, puis peut-être de réserver et d’adopter. Cette démarche reste intéressante quelque soit l’occasion (salon, exposition, concours, démonstration,...).
Par contre, personne ne devrait sortir d’un salon avec un chiot qu’il vient d’adopter dans les bras. Oui, les boules de poils sont mignonnes, mais le salon présente des races que le grand public ne connait pas forcément. Il y a très peu, voir absolument aucun adulte pouvant montrer ce que cette boule de poil va devenir. Une photo ne suffit pas à se rendre compte d’un gabarit. Combien d’abandon pour cause de "il a grandi" ? On ne devrait pas se mettre en échec, alors, adopter un chiot sans voir ses parents : non ! Non, pour plusieurs raisons d’ailleurs, en plus du physique, il est intéressant de pouvoir vérifier l’état de santé des parents (ce qui en dit long sur l’élevage), de voir leurs comportements (qui auront une influence sur le futur comportement du chiot),...
Mais je crois que les chiots, aussi craquant soit-il, ne sont pas le véritable problème... ou pas le plus gros ! Le problème, c’est la part de marketing. Aujourd’hui j’ai assisté à deux discussions différentes, toutes deux très pénibles pour moi.
La première, la personne savait quelle race elle désirait venir voir : le beagle. Bref topo sur cette race, il s’agit d’un chien de chasse, souvent élevé en groupe, qui est plutôt bruyant et surtout très actif. C’est une race intéressante pour les personnes sportives.
Un peu caricaturalement (et de mémoire), voici la conversation entre cette personne désirant en savoir plus sur le Beagle et une éleveuse de Beagle (entre autre) :
- Je ne suis pas là 10 heures par jour, est-ce un problème ?
- Oh non, mais il faudra le mettre en jardin.
Ceci est un mauvais conseil parce que : 1/ risque de vol, 2/ risque d’empoisonnement, 3/ risque de fugue,..., X/ risque de manque de temps pour gérer un chien sportif. Je pourrais faire des articles entiers sur ce sujet.
- Et il ne risque pas trop d’aboyer ?
- Oh ça, c’est une question d’éducation... Vous pouvez lui mettre un collier à citronnelle ou électrique.
Ceci est un autre mauvais conseil. Si cette personne désire un chien qui peut rester longtemps totalement seul, qui est non bruyant et qu’elle n’aborde pas la question du sport, peut-être qu’une autre race serait plus adaptée. Seulement, dans ce type de salon, on rencontre des personnes qui veulent clairement vendre leurs "produits" et qui tentent d’attraper les clients sans forcément s’intéresser vraiment à la question primordiale : est-ce que cette personne et cette race sont faites pour vivre ensemble ?
D’ailleurs, certains emploient de véritables techniques de vente. Chiot directement mit dans les bras des personnes pour les amadouer alors que le discours bien huilé est présenté. Quand les potentiels adoptants commencent à montrer qu’ils veulent réfléchir, la vendeuse enchaîne. Elle en a vendu plein la veille, et cette petite chienne intéresse plusieurs personnes. D’ailleurs, il y a quelqu’un qui est venu la voir deux fois et qui devrait revenir d’une minute à l’autre pour l’acheter. Les personnes insistent, ils veulent quand même un temps de réflexion. Pas de soucis, elle la leur réserve dix minutes (sans qu’ils l’aient demandé bien-sûr) puis après, elle partira au premier venu. Le temps de réflexion est un luxe visiblement... et il se passera forcément sous pression puisque la vendeuse y a inclus un chronomètre. Dix minutes pour décider si ils adoptent une chienne qui restera pendant des années et des années avec eux...
L’achat est manipulé. Les personnes ne peuvent pas prendre le temps de réflexion et ce type de vendeur montre bien qu’il n’est pas intéressé par qui adopte... S’il n’est pas intéressé par l’avenir du chiot qu’il fait naître, comment avoir confiance pour tout ce qu’il fallait mettre en place pour assurer ce dit avenir ?
J’ai peut-être une façon particulière de voir les éleveurs... Pour moi, ce sont (potentiellement) des acteurs de la protection animale au travers de la prévention. Ils doivent pouvoir dire "non" à un adoptant potentiel. Ils doivent pouvoir le réorienter. Lui dire : un Beagle seul dans un jardin toute la journée, ce ne sera pas épanouissant pour lui et il risque de tout faire pour fuguer. Et donc, c’est un chien qui sera mis en danger, voire qui risque l’abandon. Choisissez peut-être davantage un chien indépendant, qui se satisfera de la solitude... ou même : une peluche, car parfois aucun chien ne peut être épanoui dans les conditions annoncées. Simplement, pour pouvoir tenir ce rôle-là, ils doivent avoir un minimum de compétences, de connaissances (et d’éthique bien entendu). Dans ce salon, ce jour-là, je n’ai pas rencontré de personnes aptes à faire de la prévention. Leur simple manière de gérer les problèmes rencontrés le montrait bien... Les chiots jappent ? Cogner dans les grilles. Les chiots mordillent les barreaux ? Donner des coups avec un ou deux doigts sur les petits museaux. Il attrape une veste ? Attraper le chiot par la gorge, commencer à serrer un peu, se rendre compte que je fixe la scène choquée et que je ne suis sans doute pas la seule, relâcher le petit et tourner tout ça en dérision. Je crois que je ne veux pas savoir ce qu’il se passe "en coulisse".
Alors, est-ce un bon endroit où rencontrer des races ? Pas vraiment... Pendant ce salon, il n’y avait quasiment que des chiots. Cela ne donne pas une bonne idée de l’allure des races à l’âge adulte. En plus de cela, il y avait une petite quarantaine de race. Ça peut paraître beaucoup, mais en réalité c’est vraiment très peu... Il n’y avait par exemple aucun lévrier, très peu de berger (seulement 3 races représentées), quasiment pas de molosse, etc, etc.
En conclusion, est-ce un bon endroit où adopter ? NON ! Un millier de fois : NON !