La possessivité est un problème dont on parle assez peu mais qui est en réalité assez courant. Le chien peut défendre toute sorte de ressources. A partir du moment où le chien aime quelque chose, il peut se retrouver à prendre la décision de défendre cette chose.
Pour illustrer ceci, voici une petite liste de ressources pouvant être défendues, ce n’est absolument pas complet car comme nous venons de le dire, tout, absolument tout ce que le chien aime peut être défendable et défendu.
- La gamelle
- Les friandises
- Les caresses
- Le canapé
- Le panier
- La gamelle d’eau
- Les trous dans le sol
- Les crottes
- Les autres chiens
- ...
Lorsque l’on est avec un chien possessif, on se retrouve souvent avec l’envie de retirer la ressource ce qui permet de supprimer le conflit immédiat. Par exemple, si le chien grogne pour protéger sa ressource "canapé" lorsque l’on s’approche avec l’intention (ou pas) de le faire descendre, c’est tentant de décider que le canapé est interdit d’accès. Ainsi, plus de problèmes.
Lorsque l’on cherche à donner une friandise et qu’un autre chien s’approche et se fait durement "engueuler" par l'autre chien pour ça, c’est tentant de ne plus donner les friandises. Et c’est vrai que sur l’instant, cela permet de supprimer le souci.
J’ai imaginé un petit conte pour illustrer un petit peu ça et voir si vraiment c’est la meilleure des méthodes. Le voici.
Dans une contrée lointaine vivaient deux chiens. L’un était doré comme le soleil et l’autre clair comme la lune. Chaque jour, ils se faisaient la guerre pour décider lequel d’entre eux aurait accès au ruisseau et pourrait boire. Chaque jour, celui ayant perdu la veille, se faisait plus sauvage encore pour avoir accès à la ressource tant désirée.
Le dieu des pluies détestait les conflits et avait envie de pleurer de les voir ainsi blessés à chaque retour de bataille. Alors il s’abstient de faire pleuvoir durant des mois et le ruisseau se réduisit peu à peu pour finalement disparaître. C’était le temps de la sécheresse.
Les fleurs et les herbes sauvages flétrirent et le vent tiède pu soulever de plus en plus de poussière. La terre, autrefois généreuse, se craquela. Jusqu’à la dernière goutte, les deux chiens se disputèrent pour l’obtenir, puis il n’y eut plus rien du tout. Ils pouvaient creuser aussi profondément que leurs pattes le leurs permettent, ils n’obtenaient même plus une vague trace d’humidité.
Mais rapidement, les chiens dépérirent car boire leur était vital et en quelques jours à peine, ils commencèrent à vaciller sur leurs pattes. Fou d’inquiétude en les voyant couchés sur le flanc, immobiles et presque mort, le dieu de la pluie éclata en gros sanglot. Qu’avait-il donc fait ? Là où les blessures n’avaient pas eu le temps de les tuer, c’était lui qui les avait ainsi blessés. Il pleura tant et plus que de la montagne où jaillissait avant le si petit ruisseau naquit un véritable torrent qui se déversa dans la vallée.
Les deux chiens rampèrent jusqu’à lui et s’observèrent un instant en grognant. Devaient-ils se battre pour décider de qui avait le droit de boire ? Le chien au pelage doré s’avança un peu en dévoilant sa superbe dentition et immédiatement, l’autre chien céda, trop faible. Seulement, il était toujours à côté de l’eau et aussi loin que l’autre le fasse reculer, le torrent était si grand qu’il se retrouvait toujours près de l’eau. Alors le chien doré finit par abandonner pour boire. Enfin, l’eau coulait dans sa gorge, pansant cette douleur terrifiante qu’était celle de la soif. A plusieurs dizaines de mètres de là, doucement, sans vraiment oser y croire, le chien couleur de lune lapa une gorgée d’eau. Si douce. Si bonne. Si fraîche.
L’autre chien leva la tête, s’apercevant du méfait et grogna, mais il put seulement amener l’autre chien à fuir un peu plus loin, toujours près de l’eau et c’est là qu’il se rendit compte que peu importe combien d’eau buvait ce chien, qu’il avait toujours considéré comme un parasite, il ne pourrait pas assécher un tel torrent. Il y en avait assez pour des centaines comme eux. Rassuré dans son inquiétude, il abandonna l’affaire.
Depuis, le torrent coule toujours, mais le dieu des pluies sourit car les deux chiens devinrent amis.
Morale de l’histoire, en cas de sécheresse, on risque d’autant plus de se battre pour l’eau... Donc quand on a un chien possessif, retirer la ressource, ça marche sur l’instant, mais sur le long terme, ça n’améliorera pas la situation.
Pour gérer la possessivité, on peut travailler à partir d’association positive ou par "inondation" ou ... mais dans tous les cas, il peut être nécessaire de travailler avec une muselière dans un premier temps pour éviter tout accident. Nous allons détailler un tout petit peu des exemples d’exercices, mais uniquement pour montrer ce qui est faisable. La possessivité peut conduire à des morsures et donc ne doit pas être prise à la légère. Je recommande aux propriétaires de chiens possessifs de faire appel à des professionnels compétents pour les aider à gérer.
Exemple d’exercice par "l’inondation" ...
Dans cet exercice, on prend le problème à contre-pieds et on rend la ressource défendue tellement banale qu’elle en deviendra inintéressante. Autour de la protection des croquettes envers un autre chien, voici un exercice faisable (bien-entendu, en muselière cage, permettant d’attraper tout en assurant la sécurité des participants au début car un accident ne pourra pas améliorer la situation) : jeter des croquettes de partout dans une pièce où se trouve les 2 chiens ... il est très dur de défendre la totalité de la pièce et peu à peu les chiens apprennent à se détendre envers la présence de l’autre près des croquettes. Ça ne sert à rien de le faire partir, y’en a de partout.
Exemple d’exercice par le gain ...
Dans cet exercice, pour reprendre l’exemple du conte, le dieu de la pluie serait le chien couleur de lune. Se battre contre lui, le faire fuir, ne ferait qu’éloigner l’eau et donc serait contre-productif. Voilà ce que ça peut donner autour de la protection des caresses envers un autre chien : dès que l’autre s’approche, les caresses arrivent en plus grandes quantités. Si l’autre s’éloigne, pour n’importe quelle raison, les caresses diminuent jusqu’à disparaître totalement. Si le chien possessif tente de faire fuir l’autre (montrer les dents, grognement, ...) les caresses disparaissent immédiatement.
L’autre chien est producteur de la ressource désirée, donc son arrivée est une super nouvelle, c’est tout bêtement une association positive.
Exemple d’exercice par l’apprentissage ...
Dans cet exercice, on ne travaille pas directement une association positive mais on coupe l’herbe sous les pieds du chien, on ne lui laisse pas le temps de défendre. Ce coup-ci, on fait face à de la possessivité autour du confort et le chien défend le canapé contre l’humain. Alors que l’on veut aller sur le canapé, on prend une friandise et on appelle très joyeusement le chien qui se retrouve à descendre du canapé pour prendre la friandise. On lui apprend ainsi "descend".
Il faut savoir qu’une ressource se défend d’autant mieux quand elle est déjà en possession du chien. S’il a ses fesses sur le canapé, défendre le canapé, c’est très faisable. S’il a les 4 pattes par terre, le canapé est beaucoup plus facilement accessible à tous. Donc on fait descendre le chien, on s’installe puis on le laisse se remettre sur le canapé si jamais on est OK pour lui laisser cet accès. A force, le chien va apprendre que descendre, c’est cool et que ça n’implique pas qu’il perde réellement la ressource, donc ce n’est pas grave !
Mais idéalement, ce n’est pas tous ces exercices qu’il faudrait mettre en place mais d’abord avoir une bonne gestion de son propre environnement. Si on a 2 chiens, proposer 2 paniers confortables, ce n’est peut-être pas assez. Il faut penser aux emplacements, à tout ce qui fait qu’une place pourra être meilleure qu’une autre. Si la maison est un immense panier géant, la ressource sera tellement abondante qu’il n’y aura aucune raison de la défendre contre l’autre. Donc il faut penser son environnement pour que tout le monde puisse y trouver son compte facilement et cela réduira d’autant les risques de conflits.
Donc, pour conclure, la possessivité est un problème assez courant, qui peut se gérer plus ou moins facilement mais qui peut également conduire à des morsures, c’est donc l’un des nombreux problèmes où l’aide d’un professionnel peut être une excellente chose.