Il existe plusieurs grandes techniques pour aider un chien à dépasser une peur, parmi elles, on trouve deux techniques proches et pourtant totalement différentes sur ce qu’elles provoquent. Il s’agit de l’immersion et de l’habituation. Les deux peuvent se retrouver derrière le même argumentaire :
le chien finira par s’y habituer !C’est une idée qui peut s’avérer particulièrement dangereuse car suivant ce que l’on fait, le chien ne pourra pas réellement encaisser le choc. Il ne pourra pas passer par-dessus ce qui l’inquiète et s’y habituer. Il existe un mécanisme de survie pour des situations extrêmes qui peut se mettre en place dans une situation de peur et conduire à un calme relatif. Il s’agit d’un état de non-action. L’individu n’agit plus. Il s’agit d’un état de
détresse acquise. On trouve également des états de sidérations… Le calme ne signifie pas forcément que le chien s’est habitué ou qu’il est bien à présent.
Après coup, comment savoir si le chien s’est réellement apaisé ou pas ? Simplement en lui réoffrant des choix et en l’aidant à y prendre part. On peut lui proposer de s’éloigner activement, on peut lui demander s’il est d’accord à travers des tests de consentements, on peut observer sa communication et la respecter. Dans un cadre apaisant où il peut s’exprimer, il finira sans doute par vous montrer ce qu’il désire réellement, en montrant le stress qui n’a jamais disparu derrière l’état de détresse ou en montrant sa nouvelle confiance si on a travaillé correctement.
Mais pour éviter d’avoir à découvrir que la peur n’est jamais partie, après coup, et que nous l’avons simplement dissimulée derrière un état de non-action qui est dramatique à plusieurs niveaux, nous pouvons simplement réfléchir au protocole que nous mettons en place. Oui, le chien peut s’habituer et travailler en habituation peut être une super idée. Mais il y a des conditions derrière cette technique pour éviter de tomber en immersion.
Pour comprendre l’immersion, vous pouvez envisager une piscine vide. Mettez un individu dans la piscine, remplissez là maintenant de ce qui l’angoisse à raz-bord. Attendez. Quand l’individu ne bouge plus : criez victoire … ou mettez-vous à pleurer car c’est un drame en soi.
Pour comprendre l’habituation, vous pouvez envisager un tableau dans un maison. Mettez un individu dans la maison, libre d’aller où il veut voire même de quitter la maison. Afficher sur le tableau l’objet de son angoisse. Attendez. Quand l’individu passe sans problème devant le tableau : criez victoire.
Quelles sont les grandes différences entre ces deux techniques :
| Habituation | Immersion |
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Possibilité de s’éloigner | Oui sans aucune restriction | Non, c’est strictement interdit |
Retour au calme, période de non-peur | Oui dès qu’il le désire | Non, c’est contre-productif |
L’individu a le choix de participer, il peut se soustraire | Oui à tout moment | Non, il n’a pas le choix |
Durée du travail | Longue à très longue, au rythme de l’individu | Condensée sur quelques heures à quelques jours |
Equipement pour le travail | En liberté, en longe molle, … | En laisse courte, en cage, … |
Ressentis | Calme, curiosité, léger stress passager, joie, … | Stress, angoisse, peur, … |
En cas de doute, sur ce que l’on fait, si on veut travailler dans le respect, il est intéressant de s’arrêter et de poser la question au chien. Soit il désire participer et tout va bien. Soit il désire partir et on se doit de lui donner une zone de repli. C’est ce qui va nous protéger des risques d’immersion et ce qui nous aidera à obtenir un résultat sain : une prise de confiance du chien envers l’objet de sa peur.
Voici à présent quelques exemples d’immersion et d’habituation possible :
Un chien a peur de l’aspirateur. En immersion, on le laisse dans une petite pièce close contre un ou plusieurs aspirateurs en marche jusqu’à ce qu’il se calme visuellement. Rien de ce qu’il fait ne doit nous arrêter, même s’il attaque les aspirateurs ou se jette dans les murs, …. Finalement il ne réagit plus à l’aspirateur mais son état est à présent grave et dommageable pour sa santé. Il est en détresse.
En habituation, nous pouvons
diviser l’objet de la peur et par exemple mettre une partie de l’aspirateur seulement dans un angle dans la maison. Le chien pourra s’en approcher ou s’en éloigner. Il pourra s’y soustraire et ne pas le voir du tout. Il pourra mettre des obstacles entre cet élément inquiétant et lui. Au fil du temps, il s’habituera à cet élément immobile et prendra confiance en lui, acceptant de s’en approcher. Cette méthode peut être complétée par une association positive en mettant par exemple des récompenses variées dans la pièce de l’objet ou autour de lui.
Un chien a peur des chevaux. En immersion nous l’enfermons dans une cage, dans un paddock entouré d’un troupeau. A nouveau, rien de ce qu’il fait ne nous arrête, il peut se blesser en se jetant contre la cage ou en tentant de faire fuir les chevaux, peu importe. Finalement, il arrêtera et aura l’air calme. Cet état est une fois encore particulièrement grave même s’il a l’air zen, il est en réalité … cassé.
En habituation, nous ne pourrons pas mettre un cheval au loin facilement car le cheval bouge, vit, et sa présence est donc fluctuante. Il peut également avoir des réactions qui vont provoquer de la peur. Pour contrer ce problème, nous pouvons à nouveau diviser le signal et faire une habituation sur un seul et unique élément comme une odeur de cheval. Attention, l’odeur est difficile à manier car elle peut se répandre, mais en prenant garde à ne pas la mettre dans un courant d’air et à l’isoler suffisamment, l’habituation peut redevenir possible.
Et ainsi de suite… A cause de ces conséquences désastreuses, nous déconseillons totalement l’immersion. L’habituation quant à elle peut être une modification environnementale intéressante si elle est employée avec modération et surtout avec beaucoup de recul pour éviter de tomber dans le piège de l’immersion. Notons également que nous travaillons l’habituation dans un cadre calme et apaisée. Si le chien est stressé au quotidien, c’est une mauvaise piste.