Nous avons déjà avancé sur le sujet dans
l’article sur la sélection comportementale que je vous invite à consulter avant celui. Aujourd’hui, j’aimerais que nous parlions de races et de tendances comportementales.
Tout d’abord, connaître la race c’est loin d’être aussi évident qu’il n’y parait puisque l’immense majorité des chiens en France actuellement n’appartiennent pas à une race dans le sens où ils n’ont pas un pedigree prouvant une sélection comportementale et physique. Souvent on parle de race de manière abusive pour des chiens qui ressemblent physiquement à une race et qui peuvent aussi y ressembler en matière de comportement (ou pas). Il n’est pas rare de rattacher également un chien a une race possible non pas par son physique mais par son comportement. Ainsi un chien de berger qui aura tendance à se tapir, à baisser la tête en fixant, à ralentir, … pourrait être dit « avoir du border collie » à tort ou à raison.
C’est un premier très gros problème car cela va permettre de faire des corrélations abusives autant que de refuser des résultats contradictoires. Il a une gueule de border collie mais pas le comportement attendu ? Ouais, mais y’a d’autres races de chiens noirs et blancs qui y ressemblent… Ça doit être ça.
Pour ma part, si on décide de parler de sélection comportementale, il est important d’avoir des données (généalogiques) prouvant une sélection réelle… Mais arrêtons de chipoter : est-ce que connaître la race permet de connaitre voir de prédire le comportement ? Et bien oui… et non.
Explications. Nous avons vu précédemment qu’une sélection comportementale (et physique) ne s’arrête pas. Elle se poursuit dans le temps et il faut qu’elle se poursuive pour perdurer. Si on arrête de sélectionner « les chiens qui n’aboient pas » alors la race finira par compter de plus en plus de « chiens qui aboient ». Et pour comprendre exactement, je pense que le plus simple est de parler de tendance comportementale. Imaginons que nous ayons en face de nous deux chiens de cette race qui « n’aboie pas ». Le fait est qu’ils possèdent néanmoins des cordes vocales et donc la capacité à produire le comportement. L’environnement va également leurs donner des occasions d’aboyer et souvent, des exemples : d’autres chiens aboient. Sur 10.000 occasions, combien de fois aboient-ils ? Le premier aboiera peut-être une seule fois. Le second aboiera peut-être cinquante fois. Par rapport à la moyenne des chiens, ils aboient très peu, mais ça arrivera peut-être dans leurs vies.
La tendance comportementale va dire qu’ils aboient très peu et cette idée va intégrer la possibilité d’une variation. Par exemple dans cette race, celui qui aboie le moins n’a peut-être pas aboyé une seule fois de sa vie et celui qui le fait le plus à peut-être aboyer mille fois sur nos dix milles occasions, ce qui reste peu. Et la totalité des chiens de cette race vont être classés dans cette tendance comportementale qui va représenter tout le monde… L’objectif de sélection restera : cette race n’aboie pas. On sélectionnera ceux qui aboie le moins pour que la tendance comportementale de l’aboiement au sein de la race devienne de plus en plus petit, néanmoins, il y aura toujours parmi eux un chien qui sera celui qui aboie le plus.
Une fois que l’on a compris qu’au sein d’une race, sélectionnée avec attention, il y a néanmoins des variations cela aide, je pense, à comprendre que nous ne pouvons pas construire des tableaux en noir et blanc disant : « telle race = tel comportement » par contre nous pourrions dire : « telle race = telle sélection comportementale » puisqu’ici il s’agit juste de la volonté affichée par les personnes effectuant la sélection ou encore « telle race = telle tendance comportementale » car ici on montre la variété de comportement existant au sein de la race.
Quand on connait la tendance comportementale d’une race, il peut être intéressant d’observer un individu, issu de cette race, pour essayer de le placer au sein de cette tendance tout en sachant que le comportement n’est pas immuable. C’est-à-dire que notre chien qui aboie une fois sur dix milles occasions à deux ans, aboiera peut-être six fois lors de ses quatre ans ou au contraire, peut-être n’aboiera-t-il plus du tout car il apprend.
En termes de prédiction, cela permet également de s’attendre à certains comportements afin de les surveiller, mais il ne faut pas en oublier tous les autres. Par exemple, si je sais que dans la race on a tendance à poursuivre les choses en mouvement, j’aurais d’autant plus tendance à surveiller ce comportement et à récompenser le calme d’un jeune chiot de cette race devant les vélos. Mais même si la race a tendance à être très à l’aise avec ses congénères, je vais quand même faire le travail de socialisation nécessaire pour nous donner toutes les chances de réussir. Il ne faut partir ni perdant ni gagnant d’avance en pariant sur une tendance comportementale.
Mais surtout, si demain un client m’appelle pour un souci avec son « malinois », je ne peux pas prédire quel est le souci. Certains problèmes sont peut-être plus communs, plus courants, plus habituels, plus attendus… mais la vérité c’est qu’un second client pourrait m’appeler, juste après, avec exactement le même souci pour son « chihuahua ». La race ne m’annonce pas grand-chose.
Résumons : dans la majorité des cas, on ne connait pas la race, dans la majorité des cas, on ne connait pas la sélection réellement effectuée donc dans la majorité des cas, avoir une idée d’à quoi ressemble le chien ne permet pas de connaître son comportement actuel ou à venir. Quand on connait la race ou encore mieux la sélection réellement effectuée, alors on peut s’attendre à des comportements mais ils ne sont pas certains. Dans tous les cas, quelque soit la race et la sélection comportementale, il faudra observer l’individu pour s’assurer de son comportement réel. Dans tous les cas, quelque soit la race et la sélection comportemental nous ne pouvons pas partir du principe qu’un comportement va arriver et être stable. Rien n’est foutu d’avance et rien n’est dans la poche à coup sûr.