Vous avez sans doute remarqué que sur le site, no…
Vous avez sans doute remarqué que sur le site, nous n'essayons pas de surfer sur les buzz successifs. On ne vous relate pas, faits divers après faits divers, toutes les horreurs qui peuvent se produire. Nous ne sommes pas non plus dans une démarche de dénonciation. Il y a énormément de sujets qui m'indignent, qui me révoltent, qui me font ressentir de la colère, ... J'en ai déjà parlé autour de l'article du bal des horreurs où je parle un petit peu de la médiatisation, mais j'estime que ce n'est pas le but de ce site. Je veux vous offrir un espace où vous pouvez venir vous renseigner sans être sans arrêt confrontés à des horreurs.

Ceci étant dit, aujourd'hui, je vais peut-être énerver beaucoup de monde. Je ne vise personne en particulier et je suis désolée si cet article vous est pénible.

La notion de bien et de mal est une notion culturelle qui évolue avec le temps. Tout ce que l'on fait de "bien" aujourd'hui, pourrait être estampiller de "mal" demain. Ce qui était bien il y a très longtemps, dans certaines cultures, est vu, est considéré comme horrible à présent. Par exemple, à l'heure actuelle, si quelqu'un décide de manger quelqu'un d'autre, ça risque d'être très mal perçu ... Et ce genre de cannibalisme a pourtant pu être considéré comme étant une bonne chose en fonction des cultures, des lieux, des époques mais aussi des circonstances.

Une fois que culturellement, une chose est estampillée comme étant du côté du "bien", il est parfois difficile de se questionner là-dessus. Ce sont des sujets épineux d'un point de vue éthique d'abord, parce qu'on ne se pose pas la question. Il n'y a pas à se la poser : ça paraît OK, pour nos parents c'était OK, pour nos voisins c'est OK. Donc ça rentre dans la norme et puis voilà ...

A présent, je vais vous donner des exemples autour du chien pour que ce soit plus clair. Attention, mon propos est le suivant : on devrait se poser la question et remettre ces choses en cause, ça ne veut pas dire que la conclusion sera forcément : en fait, ça c'était mal. Je veux surtout qu'on se concentre sur les questions.

Exemple 1 : A-t-on réellement le droit de disposer du corps d'un animal et de le modifier irrémédiablement en fonction de nos envies, de nos goûts ou de nos convictions ?

Ne répondez pas. Je développe. Modifier irrémédiablement le corps d'un animal, bon, j'ai dit irrémédiablement donc on est pas en train de parler de la pose d'un vernis, d'un toilettage ou de la coupe des griffes. Par contre, on pourrait parler de l'ablation des griffes chez le chat, encore pratiquée dans certains pays. On pourrait parler de la coupe de la queue chez le chien, de la taille des oreilles chez le chien, ... encore pratiquées dans certains pays.

Les arguments pour ce genre de pratique vont être l'esthétisme (un point hautement discutable), mais également la sécurité. Couper les griffes d'un chat pourrait sauver les yeux d'un enfant .. enfin personnellement, c'est un argument que je ne comprends pas. Vivant dans un pays où cette pratique n'existe pas (à ma connaissance), je n'ai pourtant pas jamais croisé de personnes borgnes ou aveugles à cause d'un coup de griffe félin. Je ne dis pas que c'est impossible, juste : je n'en connais pas, donc ça me semble au moins très rare. Au fil des années d'écoles, on croise quand même beaucoup de personnes ... Mais bon. La sécurité concernant la coupe de la queue du chien me semble tout aussi surfaite, le cas de fracture annoncé me paraissent au mieux très rare, les cas d'infections : idem.

Arrivé à ce point là, nous sommes peut-être d'accord. Culturellement, ces trois situations (ablations des griffes, coupe des oreilles ou de la queue) ne sont pas particulièrement appréciées. J'aurais pu citer d'autres exemples moins connus comme l'ablations des cordes vocales ... et je suppose qu'il en existe encore d'autres.

Maintenant, on a peut-être envie de répondre NON, on n’a pas le droit de disposer du corps d'un animal et de le modifier irrémédiablement en fonction de nos envies, de nos goûts ou de nos convictions ... Mais on a tendance à oublier un détail. Et ce détail c'est une opération qui retire un bout du corps de l'animal. Cette opération fait l'objet de promotion pour nous apprendre que c'est bien. Cette opération c'est l'ablation des testicules ou d'une partie plus ou moins importantes du système reproducteur de la femelle. En un mot, c'est la castration.

Est-il bien ou mal de castrer un animal ?

Et là, on va me parler de but. Mais tu te rends compte, le nombre de reproductions évitées grâce à la castration ? Oui, et je suppose que si l'ablation des cordes vocales était promue, vue comme quelque chose de bien, on pourrait se féliciter du nombre d'abandons pour cause d'aboiements ou de problèmes avec le voisinage qui pourraient être évités. Ça n'en fait pas pour autant une bonne pratique. Au delà du but, il y a l'histoire du chemin.

Je pense qu'il peut être pertinent de séparer le but (pas de reproduction indésirée) du moyen de l'obtenir (la castration). Le chemin est une donnée, la destination en est une autre. Prenons un exemple très grossier : si demain, je veux aller à la boulangerie pour me nourrir ce qui est un but légitime, je peux prendre un 4X4, aller jusqu'à l'aéroport le plus proche, prendre l'avion, descendre dans la capitale de mon choix, prendre un taxi et finalement m'arrêter devant la boulangerie de mon choix pour passer commande ... avant de rentrer chez moi par les mêmes moyens, ce qui est aussi un but légitime, je ne vais pas rester à tout jamais dans la boulangerie. Mon but : me nourrir est légitime. Est-ce que vraiment la boulangerie était le meilleur choix ? Peut-être pas. Est-ce que cette boulangerie précise était nécessaire ? Peut-être pas. Est-ce que j'aurais pu choisir une meilleure méthode pour me nourrir, sans polluer la moitié de la planète avec un trajet inutile ? Ben oui. Je peux sans doute aller à la boulangerie la plus proche à vélo... Le but et le moyen sont des trucs différents.

Si le but d'éviter la surpopulation est potentiellement louable (je dis potentiellement, parce qu'en soi, ça pourrait valoir le coup de se poser sérieusement la question), on pourrait trouver des dizaines et des dizaines de méthodes différentes dont simplement la responsabilisation des personnes et apprendre à surveiller ses animaux. Utopique ? Peut-être et alors ? Si on n'y travaille pas, on ne l'obtiendra jamais ;)

Mais ça, ce n'est qu'un exemple. On pourrait en citer des dizaines.

Exemple 2 : a-t-on réellement le droit de tuer un chat ou un chien pour une raison non médicale ?

La réponse vous semble évidente ? Elle ne l'est pas. (Alors je ne vais pas vous parler de véganisme, je vais rester dans la petite sphère des chats et des chiens, mais la question du véganisme est ici tout à fait légitime ... et pourrait entraîner pleins d'autres questions tout aussi légitimes.)

Dans plein de situations, ces mises à mort vont être estampillées comme étant au mieux "un mal nécessaire", au pire "normal". C'est une question où je ne suis absolument pas neutre, vous noterez que je ne vais pas employer le mot "euthanasie" même si c'est le terme qui sera mis en avant dans ce genre de cas sans doute pour que ça semble plus doux.

La protection animale, représentée par les associations qui protègent les animaux vont tuer un certain nombre d'animaux, ce qui est un contre-sens total. Tuer ce n'est pas protéger. Ils sont sûrement en train de le faire pendant que j'écris ces mots. Ils le feront malheureusement encore quand vous serez en train de les lire. Pourquoi ? Surpopulation, manque de place ... A nouveau, ça c'est un problème, une question de but : nous avons besoin de gérer tout le monde en fonction des places existantes, mais ça n'implique pas l'obligation de suivre ce chemin de mises à mort.

On parle de tuer des portées, des bébés, des petits êtres qui auraient pu avoir la vie devant eux ... quelques jours, parfois quelques semaines de plus et on ne parlerait plus de les tuer, mais là, ils sont assez jeunes pour que ça semble "bien". On parle de tuer des vieux loulous qui ne plaisent plus à personnes. On parle de tuer des chiens et des chats en pagaille. Je ne parle pas d'une association un peu déviante qui choisit ce chemin, je parle d'une normalité dans beaucoup d'endroits à tel point que les lieux ne pratiquant pas les mises en mort ont tendance à le mettre en avant (parce que oui, ils existent : ouf !).

Si le but est potentiellement louable (à nouveau, nous pourrions nous poser la question), est-ce qu'avec le budget que coûte toutes ses mises à mort, on ne pourrait pas plutôt faire de grandes campagnes nationales autour des familles d’accueil, des paniers retraites et de toutes ces solutions d'hébergements qui pourraient offrir suffisamment de place à tout le monde ? On le fait pour lutter contre l'abandon, mais ce n'est pas le seul axe possible en soi.

Vous voulez parler d'abandon ? Des personnes sont invitées à abandonner leurs animaux pour avoir accès à des structures d'accueils, de soins, des choses de première nécessité. C'est OK ? C'est normal ? C'est bien ? A nouveau, le but n'est pas le chemin. On ne peut pas justifier d'un chemin sous prétexte que le but est louable.

Exemple 3 : a-t-on réellement le droit de faire mal à un animal dans un but éducatif ?

Non mais tu comprends, toi là, cette méthode, elle sauve des chiens. Elle évite des abandons. Elle fait énormément de bien. Ah oui ? Et bien, je vais l'affirmer bien haut : ce n'est pas le seul chemin possible ! Vous pouvez décider de faire autrement. Oui, vous pouvez choisir de fermer les yeux mais ne venez pas me dire que vous êtes en train de faire de la protection animale ! J'ai honte pour la protection animale à chaque fois que cette argument est prononcé. Et attention, on ne parle pas d'un petit argument, c'est un argument phare qui permet d'approuver des comportements humains que l'on réprouverait habituellement.

Exemple 4 : est-il légitime d'enfermer un être vivant dans un espace où il ne peut pas s'étirer, se coucher de tout son long, se lever et faire plus de quatre pas ?

Exemple 5 : est-il légitime d'imposer un isolement social à une espèce grégaire, sociable ou appréciant les contacts ?

Exemple 6 : ... Vous en voulez vraiment encore ? Est-ce que je vous parle d'un droit du travail canin, de la sécurité des individus que l'on exploite, de la compréhension de leur fatigue ? Est-ce que je vous parle des animaux outils ?

Peu importe que vous trouviez ça bien ou mal à la fin. S'indigner sur des pratiques qu'on ne peut pas changer, ça ne permet pas de faire avancer les choses. Proposer de nouveaux chemins, s'impliquer pour que ces nouveaux chemins deviennent plus viables, c'est peut-être une démarche plus intéressante, mais arrêtons-nous là et prenons une seconde pour conclure.

J'ai écris cet article, parce que toi qui me lit, tu as sans doute des animaux et tu prends sans doute des décisions pour eux. Ces décisions ont des conséquences directes sur eux et parfois, elles ont des répercutions plus importantes. Je ne peux pas prendre de décisions pour toi et je ne dis pas qu'il n'y a que de bonnes décisions, le monde n'est pas tout noir et tout blanc.

Par contre, je peux me poser la question à chaque fois que je décide de quelque chose que ce soit d'opérer mes animaux, de leur imposer telle ou telle pratique éducative ou tel équipement ... Je peux me demander sincèrement : est-ce que c'est bien ? Est-ce que c'est moral ? Qu'est-ce qui pourrait faire que ce soit immoral ? Est-ce que c'est quelque chose que je suis prête à faire subir à mes animaux ou pas ? Ça ne veut pas dire que je n'arriverai pas à la conclusion : ce chemin me convient ou encore : ce chemin ne me plaît pas bien, mais pour l'instant je n'en ai pas trouvé d'autres, je vais prendre le temps de chercher un peu. Ou peut-être : ouais, non, mauvais chemin, on arrête tout, essayons de voir ce que l'on peut faire d'autres. Et là, je ne parle même pas de changer de but alors qu'un changement de but peut-être tout à fait intéressant et moral.

Alors toi qui me lit, c'est tout ce que je voulais te dire. Essayes juste de prendre le temps d'y réfléchir, une seconde, une minute, de peser les pour et les contre et ce même si tout le monde autour de toi affirme que ce truc est normal. Se demander si mettre son chien en laisse est une bonne chose au delà des buts, est-ce que c'est un bon chemin, c'est une question légitime même si à la fin tu décides -comme moi- que oui, c'est OK. Se poser des questions est une bonne chose ! Et surtout n'oublie pas. La destination, ce n'est pas le chemin. Ce sont des choses différentes et parfois, quand un chemin ne nous convient pas, si on crie assez fort à l'aide, il y a plein de mains qui se tendent pour nous aider à en trouver un autre. Tu es sans doute beaucoup plus libre des chemins que tu choisis que tu pourrais le croire et ça, c'est plutôt une bonne nouvelle au fond.
monasgl
monasgl
Bonjour Céline, c'est, je pense, le meilleurs article sur l'éducation canine que j'ai pu lire à ce jour. Tu as su apporter une réflexion sans donner d'opinion, et rien que pour cela, un grand bravo. Il est vrai que cette réfléxion est la clé de la réussite, et elle s'étend bien plus en profondeur que le milieu canin/félin. C'est grâce à ce genre d'écrits que nous nous remettons en questions, nous réfléchissons et remettons en cause notre manière d'éduquer et de fonctionner, que nous prenons conscience que l'évolution des mentalités et des méthodes n'est et ne sera jamais figée. Merci encore, Mona