Nous arrivons au bout de notre grand dossier composé de pleins d’articles autour des patrons-moteurs et je voulais terminer avec un point sur l’adoption. Comme vous avez pu le voir, je fais parti des personnes qui estiment que l’individu devrait être au cœur du propos. Cet individu, il a une génétique qui lui est propre, il possède des groupes de comportements, des séquences, sur lesquelles on pourra sans doute mettre le terme « patron-moteur », il est également issu d’une sélection tout à fait volontaire ou pas. Cet individu reste néanmoins relativement unique, sa génétique ce sont ses cartes de départs, mais il va continuer à évoluer, à apprendre, à s’adapter à son environnement, etc.
Lorsque l’on adopte on passe classiquement par plusieurs phases. On va souvent se renseigner sur les races et on a souvent de petites préférences notamment pour les races les plus connues. En France, en 2021, c’est sans doute le berger australien, le golden retriever, le malinois, le staffy (staffordshire bull terrier), le berger allemand, le labrador, […], le shih tzu, le yorkshire, le border collie, … Finalement, on connait peut-être, pas trop mal, une cinquantaine de race ce qui forme une petite fraction seulement des races existantes, mais je ne suis pas surprise que mon frère parle d’adopter un « berger australien » ou un « husky », que ma tante ait adopté un « bouledogue français » après un « labrador » et que ma maman ait choisi à un « yorkshire terrier ». Tout ça c’est très populaire.
Certaines de ces races sont connues pour être généralement très sportives, très actives et plus en demande que ce que la moyenne des personnes va proposer peut-être du haut de leur une balade en forêt par semaine. Au moment de se renseigner, on va donc peut-être de but en blanc vous expliquer pourquoi il ne faut surtout pas adopter un « berger australien », un « husky », un « malinois », un « border collie », un « chien-loup tchécoslovaque », … Et à ce moment-là, on va vous décrire un portrait type qui a tendance à être un peu gonflé sous stéroïde. Ce qui nous intéresse c’est d’éviter les mauvaises adoptions et donc on peut forcer un peu le trait.
Avec la « mode » des patrons-moteurs est aussi arrivée l’idée que certains comportements sont génétiques et que le chien a besoin de les exprimer pour être bien dans ses pattes. On risque alors de vous dire que si vous adoptez un « border collie », il a besoin de faire du troupeau. Besoin. Besoin comme il a besoin de respirer, de manger ou de boire pour fonctionner correctement. C’est techniquement faux, si on retire la possibilité de faire du troupeau, il ne va pas tomber malade comme il le ferait si on retire la possibilité de boire ou de manger… Mais ça fait joli sur le papier et c’est facile à se rappeler. Peut-être que vous expliquer que pour s’épanouir et être bien il a surtout besoin de dépenses mentales (de réfléchir), de faire des trucs avec vous et de dépenses physiques, c’est moins reluisant. Ma foi. C’est vrai que c’est moins clair, c’est pas juste une case à cocher « fera du troupeau : oui / non »… mais ça reste bien dommage.
Cette première étape, où l’on se renseigne sur la race, est néanmoins intéressante pour une sélection globale, pour ouvrir des portes et se dire « ah tiens, ce type de chien a l’air sympa » ou pour se dire : « ah oui, ce comportement m’inquiète, je ne veux pas avoir à gérer ça ». Mais quand on ne veut pas avoir à gérer un comportement cela n’implique pas forcément de devoir s’interdire la race en question, on pourrait appliquer d’autres stratégies comme l’adoption d’un adulte au sein de la race qui ne présente effectivement pas le comportement que nous ne voulons pas…
Parfois vous allez même voir la mention « pas en premier chien », soyons clair : il n’y a pas de premier chien idéal et dans tous les cas, il va falloir être sacrément motivé pour passer par-dessus toutes les petites difficultés. A mon sens, la motivation est plus intéressante que le reste et avoir eu plusieurs chiens peut laisser croire qu’on sait gérer, parfois à tort.
Le truc c’est qu’au bout du compte vous n’allez pas adopter « un husky », vous allez adopter un chien précis, un individu et cet individu est différent des autres huskys. Il a des points communs avec eux, bien-sûr, mais ce n’est pas un clone. Il a milles petites différences. Et cet individu que vous allez choisir, il faut le choisir avec soin pour qu’il corresponde à vos critères.
Ainsi, si votre rêve depuis toujours c’est d’avoir un beau nordique aux yeux bleus, mais que vous avez peur de ne pas arriver à faire de lien avec lui parce qu’on vous a dit et répété à quel point cette race est indépendante et peu proche de l’humain alors vous avez le droit de faire le tour de tous les refuges et associations de France (et pourquoi pas d’ailleurs), de rencontrer les huskys plus ou moins typés existants jusqu’à trouver votre perle rare. Ce chien, les agents animaliers vont le décrire comme pot-de-colle, très proche de l’humain, adorant faire des trucs avec eux. Ce chien vous correspondra… et l’adopter n’est pas un non-sens. Si vous rêvez d’un berger australien mais que vous n’avez pas la capacité de gérer une très grosse activité physique, même chose, mais cette fois, on cherche un patachon, un loulou qui adore se vautrer dans les canapés et ne plus remuer. Peut-être que ce sera un ancien sportif qui a pris un peu d’âge ou un loulou qui a un petit souci de santé qui le fatigue ou même simplement, le fainéant de la portée, l’adepte de grasse-matinée… Au plus vous craignez des comportements annoncés, au plus viser un adulte, stable dans son comportement, a du sens car vous pourrez sélectionner le point que vous désirez.
Je ne suis pas en train de dire que ce sera facile, je ne suis pas en train de dire qu’il ne faut pas se renseigner au préalable, je suis juste en train de rappeler qu’au bout du compte on n’adopte pas une généralité, une statistique, une sélection… on adopte quelqu’un. Ce chien que l’on va ramener à la maison, c’est quelqu’un.
Et c’est pour ça qu’on ne devrait pas s’interdire des races, on devrait simplement affiner nos critères de sélections (moi, mon chien c’est important qu’il soit comme ceci ou qu’il ne fasse pas cela) et prendre vraiment le temps de chercher. Je suis sûre que dans toutes les races, il y a des individus que l’on préférerait ne pas avoir à la maison. Vous savez ce chien qui ne vous correspond absolument pas ? Pour ma part, ce serait un chien ultra pot-de-colle, qui ne gère aucune forme de solitude, exclusif, qui ne supporte pas les autres, … et cerise sur le gâteau un très gros destructeur. Il y a peut-être des races où l’on trouve plein de chiens qui ne correspondraient pas, mais si dans chacune on peut trouver la mauvaise perle rare, celle qui nous ferait fuir, dans chacune on peut aussi trouver un chien qui nous correspond… pour peu qu’on s’en donne la peine.
Prenons le temps d’aborder aussi le cas le plus courant et le plus complexe qui est l’adoption du chiot. Observer ce chiot, c’est important car il est déjà un individu, mais c’est un individu dont le comportement n’a rien de stable… Néanmoins, si ce petit chiot est très indépendant et que c’est justement ce qui vous inquiète, autant ne pas prendre le risque. Seulement, si vous ne voyez rien qui coince avec ce petit chiot, l’observer lui ne suffira pas. Il est intéressant de penser suivant un mode d’entonnoir.
Je regarde d’abord l’espèce, puis le type morphologique, la race potentielle, la lignée potentielle, la famille existante et enfin l’individu… L’individu quand son comportement est stable est vraiment le plus intéressant mais s’il s’agit d’un chiot, alors on peut remonter gentiment les étages pour se concentrer sur sa famille proche et sa lignée.
Des chercheurs ont récemment publié une
grosse étude sur les stéréotypes des races et la génétique montrant à quel point les résultats sont plus nuancés dans la réalité que ce que l’on veut bien faire croire. Ils ont accompagné leur étude d’un site qui permet de voir une partie des résultats. Sur ce site, on peut sélectionner des traits physiques ou comportementaux et voir combien de chiens y correspondent.
Imaginons que vous vouliez un chien à la fois très sympa avec l’humain et avec les chiens ce sont vos deux critères de bases. Vous avez peut-être déjà des races en tête mais je vous laisse prendre le temps d’y réfléchir vraiment. Quelles races faudrait-il adopter pour avoir ce chiot très sympa avec l’humain et ses congénères ?
En sélectionnant ces deux traits à la fois, la première race la plus représentée c’est le Husky. 42% de leurs Huskys ont ces deux caractéristiques. Un peu moins de la moitié donc… Personnellement, je pensais aux Labradors ou aux Goldens qui sont connus pour être proches des humains en général. Chez le Labrador on parle de 27% des chiens, chez le Golden on parle de 24%. Un peu moins d’un chien sur 4 qui présente effectivement ces deux traits… Notons qu’à 1% près, il n’y a aucune différence pour ces deux points entre le Golden et le Pitbull Americain, une occasion de tordre le cou aux idées reçues.
Alors oui, en visant le Husky (42%), j’ai plus de chance d’avoir un chien très sociable avec l’humain et les autres chiens qu’en visant le Bouvier Australien (8%) ou le Teckel (8% également). Mais 8% ce n’est pas « aucun » et 42% ce n’est pas « tous »… Donc dans tous les cas, il va falloir aller plus loin que juste la race si c’est un critère vraiment important pour moi. Oh et pour les chiens n’ayant pas de races, on est dans les 16%...
Le site en question présente plein de critères que vous pouvez combiner (ou pas) alors je vous laisse fouiller et être surpris de voir à quel point rien n’est strictement absolu.
Et pour conclure, pour ceux qui veulent adopter, je vous souhaite de bonnes recherches pour trouver l’individu qui vous correspondra.